L’armée britannique n’interviendra pas en Syrie. Les députés ont voté, jeudi 29 août, contre la motion gouvernementale défendant le principe d’une intervention en réponse aux lourds soupçons d’usage d’armes chimiques par Damas. Elle a été rejetée par 285 députés contre 272.
“Il est clair que le Parlement britannique ne veut pas d’intervention militaire britannique. J’en prends acte et le gouvernement agira en conséquence”, a réagi le premier ministre, David Cameron, après ce camouflet, ajoutant qu’il était “attaché au respect de la volonté de la Chambre des communes”.
La motion gouvernementale condamnait “l’usage d’armes chimiques en Syrie le 21 août par le régime de Bachar Al-Assad” et convenait qu'”une réponse humanitaire forte est requise de la part de la communauté internationale, impliquant si nécessaire une action militaire qui soit légale, proportionnée et destinée à sauver des vies en empêchant tout usage futur d’armes chimiques en Syrie”. Elle prévoyait un deuxième vote à la Chambre des communes avant de déclencher une action militaire, une fois obtenu le rapport des inspecteurs de l’Organisation des Nations unies.
“DES INTÉRÊTS CRUCIAUX DES ÉTATS-UNIS SONT EN JEU”
Après le rejet par le Parlement britannique du principe d’une intervention en Syrie, la Maison Blanche poursuit “les consultations” tout en laissant entendre qu’une action unilatérale reste possible.
Ce rejet britannique isole encore un peu plus les Etats-Unis dans ce dossier. Washington, qui préparait les esprits à une intervention armée avec Londres depuis plusieurs jours, a affirmé que Barack Obama poursuivrait les consultations avec ses alliés, tout en laissant entendre qu’une action unilatérale restait possible.
“Les Etats-Unis continueront à consulter le gouvernement britannique, l’un de nos alliés et amis les plus proches”, mais “les décisions du président Obama seront guidées par ce qui est dans l’intérêt des Etats-Unis”, a déclaré la porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, Caitlin Hayden. M. Obama “pense que des intérêts cruciaux des Etats-Unis sont en jeu, et que les pays qui violent les règles internationales sur les armes chimiques doivent rendre des comptes”. Le département d’Etat a également souligné que si les consultations sur la Syrie avec les “alliés” sont “extrêmement importantes, nous prenons nos décisions en suivant notre propre calendrier”.
“Notre approche est de continuer pour trouver une coalition internationale qui agira de concert, a tenu à souligner Chuck Hagel, secrétaire à la défense américain. Il est de la responsabilité de chaque pays de prendre ses propres décisions. Nous continuons de consulter les Britanniques, comme les autres alliés. Cette consultation comprend des façons d’aller de l’avant ensemble pour répondre à cette attaque à l’arme chimique en Syrie”.
Le scénario militaire relayé par la presse depuis le début de la semaine est celui d’une attaque “limitée”, dont l’objectif serait, selon le Pentagone, de “dissuader” Damas d’utiliser des gaz toxiques et de “diminuer” ses capacités à le faire. Des responsables américains, cités par le New York Times, affirment ainsi que le président américain “est prêt à continuer sur l’idée d’une attaque limitée, malgré son rejet par l’allié britannique et les doutes du Congrès”. M. Obama n’a pas émis l’intention de demander de vote au Congrès. Chef des armées, il ne s’y estime pas tenu.
Jeudi, les Etats-Unis ont annoncé le déploiement d’un destroyer supplémentaire face aux côtes syriennes, portant temporairement à cinq le nombre de navires équipés de missiles de croisière en Méditerranée orientale.
BLOCAGE À L’ONU, DÉBAT EN FRANCE LE 4 SEPTEMBRE
Le Conseil de sécurité des Nations unies est également dans l’impasse. Une réunion d’à peine quarante-cinq minutes entre ses cinq membres permanents s’est achevée sans progrès jeudi . Elle s’était tenue à la demande de la Russie, alliée de la Syrie et donc farouchement opposée à toute action militaire. Un accord onusien pour l’usage de la force en Syrie reste plus que jamais improbable.
La France, l’autre alliée de Washington au Conseil de sécurité, a reconnu, après avoir tenu des propos très offensifs, qu’une riposte militaire était “compliquée à construire”. François Hollande et la chancelière allemande, Angela Merkel, ont dit attendre les résultats de l’enquête de l’ONU, dont les inspecteurs doivent quitter la Syrie samedi. Le Parlement est convoqué le 4 septembre pour débattre de la question.
En France, comme en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, l’hypothèse d’une intervention militaire n’a jamais soulevé l’enthousiasme des citoyens, comme le montrent plusieurs enquêtes d’opinion publiées récemment
Lemonde.fr