Guinée: le FDP dresse un bilan sombre du régime d’Alpha condé (déclaration)

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Après la fin du dialogue inter-guinéen et la signature le 3 juillet 2013 d’un l’accord politique, d’aucuns avait estimé que la voie était désormais ouverte pour des élections libres et transparentes, dans une atmosphère de paix. Malheureusement, le répit n’a été que de courte durée. Les conséquences de la grave crise sociale engendrée par les méfaits de la politique du RPG Arc-en-ciel depuis son arrivée au pouvoir, n’ont pas tardé à remettre en cause le semblant de paix sociale difficilement obtenu avec l’aide de la communauté internationale. Les premiers constats sur la mise en application des dispositions de l’accord politique jettent un sérieux doute sur la volonté du pouvoir de respecter ses engagements. De nouveau, les populations sont inquiètes et se demandent où va la Guinée.

I. SITUATION POLITIQUE ECONOMIQUE SOCIALE ET SECURITAIRE

Violences inter communautaires et révoltes à répétition
Depuis le 11 juillet 2013, des violences à caractère communautaires ont éclaté à Nzerekore, entraînant des dizaines de morts – dont certains brûlés vifs –, des blessés graves en nombre indéterminé et de très nombreuses destructions d’habitations et de lieux de culte (églises et mosquées). Les affrontements ont fait rapidement tâche d’huile dans d’autres préfectures de la région forestière, causant la panique générale au sein des populations. Ces affrontements sans raison apparente ont été d’une violence inouïe, dépassant en dégâts humains et matériels, tout ce que la région avait connu jusque là. Aux dernières nouvelles, le calme ne serait toujours pas revenu malgré l’intervention de l’armée. La population terrorisée est calfeutrée chez elle. A Boffa, la population s’est soulevée pour protester contre la condamnation le 12 juillet 2013, d’un de ses fils, le Commandant A.O.B. dans l’affaire du 19 juillet 2011. Dans la banlieue de Conakry, à Kipe-Nongo, les populations, surtout les jeunes, ont manifesté et élevé des barricades trois jours durant, depuis le 15 juillet 2013, pour protester contre la rareté de l’électricité. Il faut souligner que malgré les promesses répétées de la propagande du RPG Arc en ciel, il y a aujourd’hui bien moins d’électricité disponible pour les populations qu’en janvier 2011. On ne peut même plus parler de simples délestages, tant le courant est rare. On se demande où sont passées les centaines de millions de dollars que l’on dit « affectés » à EDG. L’approvisionnement en eau potable reste toujours du domaine des rêves pour les Guinéens. Face à l’incurie et à l’incapacité d’un régime muré dans l’indifférence et l’autosatisfaction, l’exaspération des populations est à son comble. Des révoltes sporadiques peuvent éclater partout et à tout moment dans le pays.
C’est le lieu de souligner que depuis l’arrivée au pouvoir du RPG Arc en ciel, la Guinée vit une violence endémique. En juin 2011, des affrontements sanglants ont éclaté à Galapay (région de Nzerekore). De nombreux morts ont été enregistrés. Quelque temps après, dans l’indifférence totale des autorités, une campagne de destruction systématique du cheptel a été entreprise et qui a duré plusieurs semaines. Des dizaines de milliers de têtes de bétail ont été massacrées, leurs propriétaires ou gardiens chassés. En août 2012, les forces de sécurité ont organisé une expédition punitive et se sont livrées à des tueries d’une rare sauvagerie à Zogota. Dans le même temps, éclatait à Siguiri des révoltes populaires contre les exactions et les abus commis par l’administration. Les forces de sécurité ont tué plusieurs personnes. A Conakry la capitale, depuis janvier 2011, à l’occasion des manifestations pacifiques de l’opposition, près d’une soixantaine de morts, par balle ou par armes blanches sont à déplorer. Toutes ces tueries, dans lesquelles, la plupart des fois, les forces de sécurité sont impliquées, n’ont jamais fait l’objet d’enquête sérieuse permettant de déterminer les responsabilités et de faire justice. Et pour cause, désormais, des milices privées du pouvoir (chasseurs traditionnels Donzos et autres loubards ou nouveaux «gônes») sont entrées en action. L’impunité qui est de règle dans notre pays depuis l’indépendance, continue. Avec le pouvoir du RPG, la violence s’est banalisée et systématisée comme moyen de règlement des conflits de toute nature dans la société guinéenne. La prédominance de l’idéologie ethniciste et les pratiques d’instrumentalisation à outrance de la division des nationalités, nourrissent une machine infernale qui ne peut que produire cette violence. Si rien n’est fait pour arrêter le cours des choses, personne ne peut prévoir où va s’arrêter ce parcours jalonné de sang et de larmes depuis le début du mandat présidentiel, avec toutes les conséquences incalculables que cela pourrait avoir.

Débâcle économique et financière
Depuis son installation au pouvoir, le RPG Arc en ciel n’a jamais présenté au pays de politique économique. L’improvisation et le laisser aller en tiennent sans doute lieu. Le contexte juridique est instable et non fiable. L’énergie et les infrastructures manquent cruellement. Mais c’est surtout la corruption effrénée, les empiètements et les tracasseries incessantes d’une administration omnipotente qui ont créé un environnement foncièrement hostile à l’entreprise et à l’investissement privé en général. Obligation est faite aux entreprises importantes d’embaucher de préférence des partisans du pouvoir, même ceux-ci n’ont pas les qualifications requises, de recourir exclusivement à des sous-traitants liés aux pontes du régime, de licencier des collaborateurs ne répondant pas aux critères communautaires du RPG. Le résultat ne s’est pas fait attendre. Pratiquement tous les investisseurs sérieux qui étaient venus en Guinée, encouragés par l’arrivée d’un civil élu au pouvoir, ont plié bagages. La casse est effroyable car elle touche aussi bien des anciennes entreprises que des nouvelles. Les Grands Moulins de Guinée, Nestlé, Sotelgui (vétéran des sociétés de téléphonie mobile en Guinée), la société FRIGUIA gérée par RUSSAL, BHP Billiton, VALE se sont retirées de la Guinée. Le conglomérat Rio Tinto qui avait pourtant mis sur la table une enveloppe de 700 millions de $, a gelé ses activités. Tous les sous-traitants de ces entreprises ont fermé leurs portes. Des dizaines de milliers d’employés ont ainsi été jetés à la rue, créant une véritable catastrophe humanitaire dans certains cas comme à Fria qui dépendait entièrement de la première usine d’Alumine d’Afrique vieille de 60 ans. Toute la machine économique s’est effondrée, entrainant des pertes de ressources fiscales et douanières de l’ordre de 1000 milliards de Francs guinéens pour les cinq premiers mois de 2013 de l’aveu même du gouvernement. Le budget de l’Etat (plus d’un 1,4 milliard d’Euros) est presque entièrement englouti pour le fonctionnement d’un appareil d’Etat hypertrophié, totalement désorganisé et paralysé par la corruption et la politique népotique du pouvoir. Face à ses échecs, le pouvoir tente de rejeter la responsabilité sur l’opposition, alors que nous sommes face à une lame de fond nourrie par la politique néfaste mise en route depuis 2011.
Dans le domaine agricole, une initiative qu’on aurait pu saluer, s’est terminée par un fiasco dont le coût énorme reste à chiffrer. Il s’agit de la campagne lancée en 2011 tambour battant pour fournir à la paysannerie des intrants et du matériel agricole. L’affaire s’est effondrée au bout de deux campagnes, à cause du manque d’organisation et des détournements massifs qui ne permettaient pas de payer les fournisseurs et de se réapprovisionner. La plupart des intervenants sont sélectionnés parmi les fidèles du parti au pouvoir. Il faut noter que ces aides à l’agriculture n’ont pratiquement pas eu d’impact significatif sur l’offre de produits vivriers ; les prix restent très élevés pour une population misérable à la limite de la survie. Comme toute la politique du régime, cette initiative n’a pas été étudiée sérieusement dans le cadre d’une politique cohérente et soutenue.

Explosion de la corruption et de la mauvaise gestion
Dès le l’entrée en exercice du nouveau président, après un round d’observation de quelques mois, les hauts cadres de l’Etat ont rapidement compris que le mot d’ordre de lutte contre l’impunité en matière de détournements des deniers publics n’était qu’un slogan de campagne électorale. On comprend mieux à présent pourquoi le pouvoir reste sourd à toutes nos interpellations de déclarer le patrimoine des dirigeants du pays comme l’exige explicitement la constitution guinéenne. Les pratiques antérieures de détournements, de corruption et d’affairisme se sont intensifiées pour se généraliser à tous les domaines de la vie publique du pays. Il est admis par les observateurs avertis que le niveau de corruption en Guinée n’a jamais été aussi élevé qu’aujourd’hui de haut en bas de l’échelle sociale et dans tous les domaines. Malgré l’extrême opacité du système qui n’est contrôlé par aucune institution crédible, des scandales vite étouffés éclatent de temps en temps. Nous avons eu les affaires de l’emprunt-fantôme de 25 millions de dollars à une société off-shore Palladino, l’emprunt de 150 millions de dollars consentis par des Chinois associés au gouvernement angolais, champion d’Afrique toutes catégories de la prédation du bien public et de la corruption, le vrai-faux virement de 11 milliards de FG dont on n’a aucune nouvelle du côté de la justice, le monnayage des bourses au ministère de l’éducation et plus récemment l’affaire de tentative de surfacturation massive des frais de correction des examens 2013 arrêtée juste à temps par Ministère des Finances. A propos d’éducation, il est important de souligner la démission du pouvoir du RPG Arc en ciel, face à la faillite du système éducatif guinéen depuis des décennies. En soumettant le calendrier scolaire à son agenda politique, le pouvoir a volontairement réduit la durée de l’année scolaire 2012/2013 qui dans le meilleur des cas n’a pas duré plus de 6 mois. Conscient du retard accumulé par les élèves et pour faire sa campagne électorale annoncée, les examens de cette année ont été bradés de façon irresponsable pour camoufler la faiblesse chronique du niveau des élèves. Les pourcentages ronflants d’admission des examens de 2013 ne reflètent en rien le niveau très bas de nos enfants. On entretient ainsi l’illusion criminelle que tout va pour le mieux pour un secteur aussi naufragé que l’éducation alors que nous savons tous que l’école guinéenne est dans le coma et ne forme que des inadaptés sociaux et des chômeurs.
Une illustration presque parfaite de l’interaction entre la corruption et la faillite économique du pouvoir du RPG Arc en ciel est donnée par le cas de FRIGUIA : cette usine bazardée pour une bouchée de pain à RUSSAL par le régime de feu Lansana Conté est à l’arrêt depuis plus d’un an. Des révélations publiques ont été faites récemment sur des versements de pots de vin à des pontes du pouvoir, numéro de compte de banque à l’appui. D’autres accusations aussi graves ont été lancées sur le financement de locations d’avions. Ainsi il est clair que le pouvoir, en accointance avec RUSSAL n’est absolument pas en mesure de négocier avec cette société un arrangement gagnant-gagnant sauvegardant les intérêts de la Guinée et ceux des 4000 travailleurs jetés à la rue. Non seulement le gouvernement n’est pas en mesure de faire entendre raison à RUSSAL pour reprendre l’exploitation de Fria, mais en plus, il lui a octroyé une nouvelle concession à Dian-Dian.
Il faut également rappeler qu’à ce jour personne ne sait ce que le gouvernement guinéen a fait des 700 millions de dollars de Rio-Tinto. Peut-être ne le saura-ton jamais.
Dès son installation, le nouveau pouvoir s’est activé à se constituer une nouvelle classe d’hommes d’affaires, tout en cherchant à casser la base économique de ceux qui sont supposés supporter l’opposition. Les incendies criminels de magasins et de boutiques à la suite des manifestations de l’opposition allaient dans ce sens, mais ce n’est pas tout. Par les contrats juteux de marchés de gré à gré ou des marchés truqués, le pouvoir a fabriqué à la hâte ses nouveaux riches, recrutés comme par le passé dans ses cercles familiaux. Tous les marchés de travaux publics et bâtiment sont réservés de fait à des entreprises comme GUITTER ou OAS entre autres, placées à l’abri de la concurrence. Ce sont ces mêmes entreprises que l’on impose comme sous-traitants exclusifs des sociétés minières de la place.
Les serviteurs de l’Etat qui ont voulu à leur niveau s’opposer à ces pratiques maffieuses l’ont payé de leur vie. A ce jour, trois assassinats restent non élucidés : Mamadou Alpha Diallo, un ingénieur statisticien, Cole un ingénieur informaticien travaillant sur les salaires fictifs dans la fonction publique et l’ancienne directrice du Trésor Madame Aissatou Boiro. Malgré tous les indices pointant sur des exécutions sommaires opérées par des professionnels, on continue à nous servir l’explication d’un crime crapuleux de petits bandits de quartier. Il serait intéressant qu’un jour, l’ancien ministre de l’enseignement supérieur limogé depuis (M. Morike Kamara), s’explique sur sa croisade perdue contre les dizaines de milliards de FG qui partent chaque année vers des « universités » privées pour payer des bourses d’études à des étudiants plus ou moins fantômes.

Changement à reculons
En deux ans et demi de pouvoir, le RPG Arc en ciel non seulement n’a pas positivement changé la Guinée comme il l’avait promis, en s’attaquant aux graves maux légués par les pouvoirs précédents, mais dans la plupart des fois, il les a aggravés. Comme par le passé, le pouvoir actuel ne profite qu’à une toute petite minorité, alors que le peuple croupit dans une misère indescriptible jamais connue auparavant. Toute la politique suivie par le gouvernement actuel ne peut conduire à terme qu’à une misère encore plus grande du peuple dans son écrasante majorité, la violence et la désintégration politique, économique et sociale de notre pays et

II. PROCESSUS ELECTORAL BIAISE

Même avec l’accord politique du 3 juillet 2013, il était clair que le pouvoir n’a pas renoncé à utiliser tous les moyens imaginables pour réaliser son objectif de s’emparer à tout prix de la prochaine assemblée, quand bien même la grande majorité de la population lui est défavorable. Tout est mis en œuvre pour vider l’accord de son contenu et précipiter les élections sans que le processus ne se déroule correctement. Nous avons vu la tentative de fixer la date des élections le 15 ou le 28 juillet, alors même que les conditions techniques d’une élection honnête, transparente et inclusive n’étaient pas remplies. Par la suite, nous avons eu la fixation du scrutin le mardi 24 septembre 2013. Cette manœuvre grotesque réduit presque à néant les possibilités de vote des Guinéens de l’étranger. La date limite de dépôt des candidatures a été abusivement fixée par la CENI au 20 juillet, alors même que les caractéristiques de notre système électoral ne permettent pas de réunir dans ce délai, les documents nécessaires.
Plus grave, la révision complémentaire prévue par les accords est entrain de tourner à la mascarade et ressemble à une opération escargot savamment montée pour «griller» les 15 jours alloués.
Sur la base des rapports que nous recevons de nos représentants dans les CARLE, d’innombrables incidents récurrents et généralisés sont signalés :
– Equipes de saisie désorganisées et ne pouvant jamais être complètes avant 13 heures ;
– Pannes quasi-permanentes de toutes sortes survenant sur le matériel et ses accessoires ou périphériques ; la panne d’un seul maillon du système paralyse tout le processus ;
– Incompétence manifeste du personnel déployé par la CENI ;
– Confusion entretenue sur la couverture des frais des membres des CARLE pour les décourager;
– Limitation drastique des frais relatifs au fonctionnement du matériel (carburant), réduisant le temps de fonctionnement à quelques heures ;
– Tracasseries inutiles à l’endroit de certains citoyens désireux de se faire recenser ;
– Etc.

Le résultat de toutes ces anomalies que les membres des CARLE ici présents vont vous détailler est qu’un nombre infime de citoyens parviennent à se faire réviser ou recenser chaque jour, alors que le temps passe et que quelque part des gens regardent la montre…
Si les choses continuent en l’état, un nombre important d’électeurs et d’électrices ne pourront pas voter, ce qui, pour nous est inacceptable car il s’agit d’une violation flagrante des accords passés.
Le RPG Arc en ciel a une tradition bien établie de non-respect de ses engagements. Et nous ne sommes qu’au début du processus qui devrait durer 84 jours. Il est indispensable que toute l’opposition se mobilise, afin de changer le cours des choses en recourant à tous les moyens légaux à sa disposition, y compris le texte de l’accord du 3 juillet 2013, faute de quoi, nous n’aurons pas le 24 septembre 2013 des élections libres, équitables et transparentes.

Le FDP attaché à l’unité de la Guinée, à la justice sociale, aux valeurs éthiques de bonne gouvernance et aux principes universels de démocratie, à l’ambition de rassembler une majorité de Guinéennes et de Guinéens pour qu’ensemble nous changions le cours des choses afin d’engager notre pays sur le chemin de la renaissance et de la prospérité.
Nous appelons toutes celles et ceux qui partagent ces idéaux à nous rejoindre, afin de constituer une alternative crédible pour sortir des griffes des systèmes dictatoriaux, prédateurs et corrompus qui ont sévi en Guinée depuis l’indépendance et qui ont ruiné notre pays, acculant ses populations à la misère extrême, à l’exil ou à la mort lente sur place. La longue lutte de notre peuple pour bâtir une Guinée fraternelle, débarrassée des maux du passé et du présent doit continuer. La victoire est certaine.

Conakry, le 18 juillet 2013
Pour le FDP, le Coordinateur
Mamadou BAH Baadiko




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