Vème Sommet Mondial de l’entrepreneuriat à Marrakech: ce que le président Alpha Condé a prononcé (discours)

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Marrakech, le 20 novembre 2014

Votre Majesté le Roi Mohamed VI (Que Dieu vous assiste),

Votre Excellence Monsieur Ali Bongo Ondimba, Président de la République Gabonaise,

Votre Excellence Monsieur Joe Biden, Vice-Président des Etats Unis d’Amérique,

Monsieur le Premier Ministre du Royaume du Maroc

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des Institutions Internationales,

(Autres Protocoles)

Distingués Invités,

Mesdames et Messieurs,

Je voudrais tout d’abord transmettre les meilleures salutations des populations guinéennes à tous les participants de cette cinquième édition du Sommet Mondial de l’Entreprenariat, ici à Marrakech, merveilleuse ville jardin, qui a émergé au fil des ans comme un centre convoité de rencontres et de conférences.

Je voudrais également, au nom du Peuple de Guinée, du Gouvernement et en mon nom propre, remercier vivement Sa Majesté le Roi Mohamed VI (Que Dieu l’assiste), le Gouvernement et le Peuple Marocains pour l’invitation qu’ils nous ont faite de participer à ce Sommet, ainsi que l’accueil fraternel et chaleureux qui nous a été réservé depuis notre arrivée à Marrakech.

Je saisis aussi cette occasion pour leur exprimer ma profonde gratitude et celle du Peuple de Guinée pour leur soutien, leur fraternité et leur solidarité à notre égard au moment où l’épidémie de fièvre hémorragique à virus Ebola a mis à rude épreuve le personnel et les infrastructures de notre système de santé publique et affecté très négativement les investissements, le commerce extérieur, la croissance économique, les prix, l’emploi, les finances publiques et la sécurité, menaçant ainsi de mettre en péril les progrès que nous avons réalisés au cours des quatre dernières années pour jeter les bases de l’émergence de la Guinée.

C’est en ces moments difficiles que l’on reconnait ses amis. Le Peuple de Guinée se souviendra de l’élan de fraternité de Sa Majesté le Roi Mohamed VI et du Peuple Marocain Frère. Il sera très reconnaissant.

Nous sommes également reconnaissants à la communauté internationale pour son engagement à nos côtés, non seulement pour éradiquer Ebola, mais aussi pour nous accompagner dans la période post-Ebola afin de renforcer le système de santé publique, relancer les investissements, la croissance économique et l’emploi, consolider les finances publiques et poursuivre les progrès de la Guinée vers l’émergence.

Le Sommet de Marrakech a pour thème général « l’exploitation de la puissance de la technologie en faveur de l’innovation et de l’entrepreneuriat », avec cinq (5) sous-thèmes principaux portant respectivement sur (1) l’intégration régionale, (2) la croissance économique durable, (3) l’innovation sociale pour les jeunes, (4) le développement humain et (5) la migration.

Dans le cadre de ce thème général, je vais développer trois parties essentielles dans la suite de cette allocution : en premier lieu, une vision pour l’avenir et le rôle de l’Afrique dans la transformation de l’économie mondiale dans cette ère de progrès technologiques rapides et d’innovations ; en deuxième lieu, l’importance de la coopération internationale dans l’accélération des transformations nécessaires ; et en troisième lieu, la description des projets novateurs que nous sommes en train de mettre en œuvre en Guinée pour nous préparer à la réalisation de cette nouvelle vision et ambition pour l’Afrique.

Une nouvelle vision et ambition pour l’Afrique

Concernant le premier point, je voudrais souligner qu’avec la vulgarisation des nouvelles technologies, le développement d’une nouvelle attitude plus propice à l’innovation et la promotion de l’esprit d’entreprise, l’Afrique pourrait progressivement et très assurément prendre le relai d’usine du monde à l’Asie qui, dès à présent, va devoir de plus en plus améliorer les rémunérations de ses travailleurs et les conditions de vie de ses populations.

Dans ces conditions, les coûts des facteurs de production vont s’accroître substantiellement en Asie et la croissance asiatique, comme celle de l’Europe et de l’Amérique du Nord, sera davantage portée à l’avenir par la demande intérieure, au lieu des exportations, comme nous l’avons connu depuis la deuxième moitié du vingtième siècle.

L’Afrique, par contre, qui a toujours disposé d’une main-d’œuvre abondante et à bon marché, mais pas toujours bien formée, va dorénavant capitaliser sur les nouvelles technologies, l’innovation et l’esprit d’entreprendre pour améliorer son savoir-faire. Ce faisant, elle va substantiellement réduire les coûts de ses facteurs de production, accroître de plus en plus la part des exportations dans le bilan de sa croissance économique et ambitionner de devenir la nouvelle usine du monde.

Les progrès technologiques et les innovations dans la croissance et la transformation des économies africaines ne seront pas synonymes de chômage. Au contraire, ils introduiront des synergies en faveur d’une création massive d’emplois productifs. De plus, ils ne se feront pas au détriment de l’environnement. Enfin, ils tiendront compte des leçons du passé dans les pays industrialisés ou émergents pour accélérer les changements et la transformation de l’Afrique.

En ce qui concerne la création d’emplois, la vulgarisation des nouvelles technologies en Afrique donnera des opportunités de formation et d’employabilité à des parties de plus en plus larges de la population et de la main-d’œuvre qui étaient restées longtemps exclues des progrès de l’économie moderne. Et comme cette employabilité s’accompagne d’une baisse soutenue des coûts des facteurs en Afrique, les parts de marché africaines devraient s’accroître et avec elles l’emploi.

Pour l’environnement, les nouvelles technologies sont plus favorables à l’écologie. Tirant des leçons de l’expérience passée des pays industrialisés et des pays émergents en matière de pollution de la nature au cours des phases successives d’industrialisation, ces nouvelles technologies innovent en matière d’énergies renouvelables, de recyclage de ressources rares et d’assainissement, conduisant à des progrès considérables de l’économie verte.

Finalement, avec les innovations et la maîtrise des nouvelles technologies, les progrès et les transformations qui ont pris plus d’une décennie à s’accomplir dans le passé, pourraient se réaliser en deux ou trois ans dans le futur pour la renaissance de l’Afrique.

L’importance de la coopération internationale

Pour la réalisation de cette nouvelle vision pour l’Afrique, il convient également de mettre l’accent sur la nécessité de la coopération internationale, aussi bien Nord-Sud que Sud-Sud, y compris l’intégration régionale. Au-delà de l’assistance technique et financière, le renforcement du partenariat économique et commercial entre les Nations est essentiel au transfert de technologies et à l’ouverture des marchés des pays industrialisés et des pays émergents aux entreprises des pays en développement. A cet égard, nous avons accueilli avec satisfaction le programme Young African Leader Initiative du Président Obama qui a permis à des jeunes entrepreneurs guinéens et africains dynamiques de bénéficier de l’expérience théorique et pratique des plus grandes entreprises américaines, et de promouvoir ainsi l’innovation, les investissements, la croissance et la réduction de la pauvreté.

De même, le programme de l’AGOA représente une opportunité unique pour nos entreprises africaines d’exporter leurs produits aux Etats Unis en franchise de douane, tout en leur permettant d’adapter leur production aux normes et standards du commerce international les plus rigoureux.

Nous invitons les autres pays industrialisés, les pays émergents et les autres continents, notamment l’Europe et l’Asie à émuler les Etats Unis d’Amérique et à offrir ce type d’ouverture commerciale et de franchise douanière aux pays africains pour accroitre leur part du commerce international et améliorer les incitations à l’investissement privé.

Un concept et des projets novateurs en Guinée

Pour la dernière partie, j’aimerais exposer ici qu’un projet novateur est en cours de réalisation en Guinée pour la connexion de l’ensemble des établissements d’enseignement secondaire, professionnel et supérieur à l’Internet. Ce projet, qui sera étendu aux établissements d’enseignement primaire, permettra de créer des centres d’incubation, des laboratoires d’innovation en faveur d’une nouvelle forme d’entreprenariat.

Les technologies aux services des autres secteurs tels que l’agriculture ou l’agro-business, la sante, l’éducation ou le commerce, favoriseront l’éclosion d’une nouvelle forme d’économies sectorielles et la création d’emplois, ainsi que l’élimination de la fracture numérique et de l’exclusion.

La simplification et la modernisation de l’administration par l’intermédiaire des nouvelles technologies de l’information et de la communication donneront une meilleure visibilité aux opérateurs économiques nationaux et aux investisseurs étrangers.

Une autre initiative en cours de réalisation en Guinée, en collaboration avec le Groupe Bolloré, consiste aussi à encourager le développement des nouvelles technologies par la création, autour d’une ligne de chemin de fer, des Blue zones entièrement indépendantes en énergie, eau et internet. Ces Blue zones, qui permettront le développement d’activités économiques et socio-culturelles pour la jeunesse, accueilleront des cités technologiques qui sont des espaces dédiés au développement et à la création de nouvelles entreprises innovantes. Ces centres permettront à ces entreprises de valider leurs innovations en situation réelle et de trouver des partenaires. Une première cité technologique a déjà été inaugurée à Conakry et d’autres vont suivre.

La Guinée est aussi en train de se doter de 4.000 kilomètres de fibre optique pour permettre l’accès de tous à l’internet et aux nouvelles technologies de l’information.

Nous évoquons ces projets dans le but d’encourager les participants de cet important sommet à nouer des partenariats technologiques et financiers avec les entreprises guinéennes pour impulser l’innovation.

Conclusion

Pour conclure, je voudrais exhorter tous les participants à ce Vème Sommet Mondial de l’Entrepreunariat à faire des occasions de rencontre et de dialogue qui leur seront données au cours de ces trois jours des rendez-vous du donner et du recevoir en matière de transfert de technologie, d’innovation et de création d’entreprises. En effet, la vulgarisation de la technologie, des nouvelles innovations et de la culture de l’entrepreneuriat, surtout parmi les femmes et les jeunes, va permettre de tirer le meilleur parti des incitations du secteur privé à accroître les investissements et la production, et à réduire la pauvreté dans les pays en développement, notamment en Afrique.

Eu égard à l’épidémie de la fièvre Ebola en Guinée et dans d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, je voudrais porter une attention toute particulière à la session interactive relative à la santé organisée en partenariat avec le cabinet McKinsey, avec l’objectif d’y mettre un accent sur les leçons à tirer de la riposte contre Ebola, sur le renforcement des systèmes de santé publique, et sur la réponse à apporter par les pays affectés et la communauté internationale à l’impact négatif de la maladie sur la situation économique, financière et sociale.

Je vous remercie de votre attention.




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