Les premiers soldats tchadiens de retour du Mali ont été accueillis en héros hier à Ndjamena au cours d’une cérémonie en leur honneur place de la Nation. « Mission accomplie pour Deby », titre Le Pays au Burkina qui s’interroge sur les raisons de ce retrait qu’il estime plutôt précipité… « C’est vrai que le parlement tchadien avait voté le retour des troupes engagées sous le coup de l’urgence au Mali, mais on ne se doutait pas que les choses iraient si vite », relève le quotidien burkinabé. Alors, « on peut penser, poursuit-il, que la situation intérieure tchadienne avec les suspicions de complot contre le chef de l’Etat y est pour quelque chose. En effet, Idriss Deby a peut-être jugé utile de rappeler du front malien ses éléments, que beaucoup d’observateurs qualifient comme étant les meilleurs, en vue d’assurer sa propre sécurité. Le faste accueil qu’il a réservé à ces soldats qui rentrent du front est aussi pour lui une occasion de reprendre des couleurs en ces moments difficiles où son régime est quelque peu secoué par cette histoire de présumée tentative de coup d’Etat militaire. »
En tout cas, relève encore Le Pays, « pour ce qui est du bilan de leur mission au Mali, il y a lieu de rendre hommage aux soldats tchadiens. De toutes les troupes nationales engagées au front à ce jour, ils auront payé le plus lourd tribut. Mais, ils auront réussi à dompter le combien difficile massif des Ifoghas avec en prime les têtes de Moctar Belmoctar et de son non moins sinistre compère Abou Zeid. Les soldats tchadiens auront ainsi fait preuve d’une vaillance au combat dont tout peuple serait fier. »
L’Observateur, toujours au Burkina, estime également que ce triomphe à la romaine fait les affaires d’Idriss Deby : « nul doute que tout ce ramdam autour de l’arrivée des +warriors+ (des guerriers) de Deby, avec haie d’honneur de la population, n’est pas dénué de tout calcul politicien, surtout que ce retour triomphal intervient dans un contexte marqué par cette affaire de ‘coup d’Etat manqué’. Idriss Deby pourrait en profiter pour caresser l’armée dans le sens du canon et montrer qu’elle est avec lui, fidèle et loyale. »
Kidal en suspens…
Toujours est-il que si les tchadiens ont entamé leur retrait au Mali, sur place, la situation n’est pas totalement réglée… En effet, il y a toujours le cas de Kidal, la grande ville du Nord entre les mains du MNLA. Et les médias de la sous-région continuent de s’interroger sur le sort de cette ville et sur l’attitude des uns et des autres… « L’ultime bataille aura-t-elle lieu ‘ », se demande ainsi le site d’information Guinée Conakry Infos . L’armée malienne va-t-elle passer à l’offensive ‘ « Après la chasse aux islamistes par les soldats français et tchadiens en particulier, les autorités maliennes vivent comme un affront le fait qu’une portion du territoire soit encore sous le contrôle d’un groupe rebelle. Fut-il le MNLA. On a même l’impression, poursuit Guinée Conakry Infos, que la situation est d’autant plus mal vécue qu’il s’agit justement de ce groupe rebelle par lequel tout le malheur est arrivé à partir d’un certain 17 janvier 2012. Mais au-delà du MNLA, c’est l’opération Serval qui est visée par cet accès de colère, relève le site guinéen. En effet, si le MNLA occupe aujourd’hui Kidal, c’est bien avec la bénédiction des soldats français et accessoirement des troupes d’Idriss Deby. »
La Nouvelle Tribune au Bénin s’interroge également…. « Attaquera, attaquera pas ‘ La guerre de Kidal aura-t-elle lieu ‘ Ce sont là les questions que tous se posent désormais sur la nature de l’offensive que veut mener au Nord-Mali l’armée régulière du pays, face aux rebelles touaregs du MNLA qui lui refusent l’accès de la localité de Kidal. »
La stratégie de Paris
La Nouvelle Tribune qui constate que cette « question de Kidal est le grain de sable dans le moulin franco-malien. » En effet, précise le journal, « tout porte à croire que Paris soutient le MNLA dans son refus de l’entrée de l’armée malienne à Kidal. Pour preuve, les autorités françaises proposent que l’administration civile soit déployée à Kidal. Mais curieusement, elles ne demandent pas aux rebelles de laisser les forces gouvernementales prendre le contrôle de la ville. »
Alors quelle est la stratégie de Paris ‘ Il y a comme un « doute malgré les assurances françaises », estime Le Pouce à Bamako. Le Pouce qui relève que la France souhaite rapidement des élections, sur toute l’étendue du territoire malien, y compris donc à Kidal, mais aussi que la France veut éviter tout affrontement entre soldats maliens et troupes du MNLA. Alors, pour Le Pouce, il faut clarifier la situation : « la nécessité que Kidal revienne dans le pouvoir central du Mali doit faire impérativement l’objet de discussion entre Bamako et Paris. Et les chefs d’état-major de la CEDEAO l’ont réaffirmé, rappelle le journal malien : la question de Kidal doit être clarifiée avant la tenue des élections. Ceci pour dissiper toutes les ambiguïtés. »
RFI