En réaction aux activités d’espionnage attribuées à la NSA, le Parlement européen a adopté, mercredi 23 octobre, à une courte majorité (280 voix pour, 254 contre, 20 abstentions) une résolution non contraignante demandant la suspension de l’accord sur la transmission de certaines données financières de l’Union européenne vers les Etats-Unis.
Entré en vigueur en 2010, cet accord prévoyait que les Etats-Unis pourraient avoir accès à un certain nombre de données financières transitant par la base de données financières de la Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication (Swift), sise en Belgique, dans le cadre de son programme de traque du financement du terrorisme (TFTP).
Les flux financiers internes à la zone euro devaient notamment être exclus, et les demandes de Washington devaient être motivées et suffisamment précises pour réduire au minimum le volume des données transmises.
INFRACTION GRAVE À L’ACCORD
Mais, en septembre, la presse anglo-saxonne, s’appuyant sur des documents divulgués par Edward Snowden, a affirmé que les Etats-Unis espionnent massivement le réseau Swift, en violation complète du fameux accord. Le Parlement européen se dit “gravement préoccupé” par les révélations relatives aux activités de la NSA “qui constitueraient une infraction grave à l’accord”.
Le texte voté faisait l’objet d’une proposition commune des socialistes, des Verts et des libéraux du Parlement européen. Le PPR avait proposé de son côté un texte exigeant lui aussi des clarifications, mais demandant, “pour des raisons de sécurité”, qu’il n’y ait pas de suspension de l’accord avec les Etats-Unis.
Pour la députée du groupe Verts, Hélène Flautre, ce vote “ouvre la voie au Conseil européen des 24 et 25 octobre (…) les chefs d’États et de gouvernements des États-membres ont l’opportunité de prouver que la défense des droits fondamentaux des citoyens prévaut sur toute autre considération”.
ENQUÊTE SUR LES ACTIVITÉS DE LA NSA EN EUROPE
Lundi, la commission parlementaire Libertés civiles, justice et affaires intérieures (LIBE) avait approuvé un projet de règlement sur la protection des données personnelles visant à limiter l’exploitation commerciale des données privées par les sociétés Internet, à renforcer les droits des consommateurs et à unifier la législation dans tous les pays de l’Union.
La commission LIBE a lancé une enquête sur les activités de la NSA en Europe, et auditionne des experts informatiques, des militants des droits de l’homme et des journalistes. De nombreux députés exigent à présent que l’UE prenne des mesures de rétorsion. Entre-temps, la Commission de Bruxelles, aiguillonnée par le Parlement, s’active. Fin septembre, la commissaire aux affaires intérieures Cecilia Malmström était venue débattre avec les eurodéputés d’une éventuelle dénonciation de l’accord TFTP.
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