En Afrique de l’Ouest, son nom varie en fonction des ethnies et des pays. Mais son utilisation à des fins aromatisantes et sa rentabilité économique en font un arbre très prisé.
Parkia biglobosa est certainement un nom qui ne dit rien aux nombreux consommateurs des fruits du néré, qui est pourtant présent dans le tableau des aliments réalisé en 2019 par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Cet arbre qui peut mesurer jusqu’à 25 mètres de haut, pousse de façon naturelle dans les zones semi-arides et joue un rôle important dans le quotidien de nombreux ménages.
“Dans le domaine de l’alimentation, le néré, qu’on appelle au Sénégal nététou, est très prisé dans la cuisine. Les fruits contenus dans des gousses sont parfois utilisés pour faire de la bouillie pour les enfants. C’est un fruit qui aide les populations, surtout dans les périodes qui précèdent la saison des pluies. Au moment d’attendre les prochaines récoltes. Et même pendant la saison des pluies, on l’utilise,” explique Assane Goudiaby, enseignant-chercheur à l’Institut des sciences de l’environnement de l’université (ISE) Cheikh Anta Diop de Dakar et spécialiste de la flore et de la végétation naturelles.
“Une fois qu’on utilise la pulpe jaunâtre, la graine va servir à produire le nététou. Donc le netétou est issu d’une fermentation de cette graine. C’est un procédé que les femmes maîtrisent très bien. Et on l’utilise pour rehausser un peu les plats. Beaucoup de gens l’adorent. C’est un produit qui, actuellement, joue un rôle économique très important, parce qu’il est très bien vendu. On en trouve dans tous les marchés de Dakar,” poursuit le professeur Assane Goudiaby.
“L’arbre qui produit ce fruit joue aussi un rôle important dans la faune sauvage. Par exemple, toutes les espèces de singes vivant dans la zone où on a cet arbre-là se nourrissent de ses fruits pendant une période de l’année. L’arbre joue aussi un rôle extrêmement important dans la production de miel. Parce que c’est une espèce mellifère, qui produit du nectar et de la polanine. Les chauves-souris qui se nourrissent de nectar sont responsables avec les abeilles de la polinisation des fleurs de cet arbre”, soutient le Pr Assane Goudiaby.
Le néré riche en protéines mais…
La valeur nutritionnelle du néré est aussi un mystère pour nombre de consommateurs. Cependant, elle dispose de beaucoup de minéraux, explique le nutritionniste sénégalais Doudou Sylla.
“Les graines de néré fermentées et séchées sont riches en phosphore, en potassium et en calcium. Dans 100 grammes de ces graines, on peut retrouver 443 mg (milligramme) de phosphore, 465 mg de potassium et 435 mg de calcium.”
Comme toutes les protéines d’origine végétale, il existe des facteurs limitants, précise le Docteur Doudou Sylla.
“La protéine du néré est déficitaire en certains acides aminés indispensables, tels que les acides aminés soufrés. Par contre, elle est riche en lysine. Cette lysine est importante parce que la plupart des protéines des céréales que nous consommons en sont déficitaires. Et les protéines du néré en contiennent. Donc ça permet en quelque sorte de faire ce qu’on appelle de la complémentation entre le néré et certaines céréales que nous consommons”, révèle le Dr Sylla.
“Cependant, il faudrait savoir que les quantités de néré que nous mangeons sont très infimes. Puisqu’il est utilisé comme un condiment dans la préparation de certains plats comme le Thiéboudiène (riz au poisson). On n’en consomme pas en grande quantité. Si on veut couvrir ses besoins en protéines, ce n’est pas le néré qui serait conseillé, sauf pour les personnes qui en consomment de grandes quantités. À ces personnes, il serait conseillé d’associer le néré à des céréales pour avoir des protéines de meilleure qualité biologique.”
Une activité à haut rendement
La commercialisation des fruits du néré transformés en “soumbara” est une activité très répandue dans la région administrative de Kankan, dans l’est de la République de Guinée, comme dans le reste du pays. Mais, le processus de transformation du soumbara, par des coopératives de femmes, est très laborieux, indique Djenaba Mady Kaba, conseiller régional de la Confédération nationale des organisations paysannes de Kankan, en Haute-Guinée.
Le soumbala ou soumbara est un condiment fabriqué traditionnellement avec les graines de l’arbre néré, il utilisé en Afrique de l’Ouest et est connu pour son odeur forte.
“Il faut d’abord procéder à la cueillette du fruit, puis le sécher, le décortiquer et le piler dans un mortier, faire le tamisage, laver les graines et faire bouillir. C’est quelques-unes des techniques que les femmes utilisent pour la transformation des fruits du néré en soumbara. Le néré est une plante qui pousse dans toute la région de Kankan. La vente de ses fruits est une activité à haut rendement économique. Sur le terrain, vous verrez des femmes qui ont construit leurs maisons avec des revenus tirés de cette activité,” affirme M. Kaba.
Dans la région de Kankan et même ailleurs en Guinée, le parkia biglobosa ou néré, qui est de la famille des mimosaceae, est menacé non seulement par l’effet des feux de brousse, mais aussi par les effets anthropiques comme la coupe abusive du bois.
Bbc Afrique