Remarques préliminaires ‒ Les observations couramment adressées par certains de nos compatriotes et qui consistent à vouloir trouver dans chaque article rédigé sur la Guinée ce qu’ils appellent un « équilibre de jugement ou une objectivité » ne sont ni moins ni plus que l’énorme ambiguïté entretenue sciemment ou inconsciemment sur ce pays. Comment peut-on faire « l’équilibre sur l’analyse de la confrontation de l’agneau et de l’hyène », si d’emblée l’on ne ferme pas les yeux sur les agissements de l’hyène ‘ Dans notre pays, le pouvoir en place a toujours été absolu, y compris aujourd’hui encore. Le président est le maître absolu à bord du navire Guinée: « …les mauvaises habitudes prises sont telles que je dois tout surveiller et tout vérifier. », a dit Alpha Condé. Comment un homme, peut-il, à lui seul, avoir l’omniscience de tout surveiller et de tout vérifier dans le détail des divers domaines d’un Etat ‘ En cela, il est dans le droit fil de Sékou Touré dans la conduite des affaires publiques. Et, à ma connaissance, aucun leader de l’opposition ne conteste aujourd’hui que c’est lui, le président de la République de Guinée. S’il voulait, en toute sincérité, débloquer tous les obstacles institutionnels que nous connaissons, nous ne serions pas dans l’impasse connue de tous. Il tient, en sous-main, toutes les institutions républicaines comme ce n’est pas pensable en régime républicain. Aussi ,et pour la Guinée, je le rends plus responsable de la paralysie actuelle que l’opposition politique en face car c’est lui le capitaine du navire Guinée et je ne tomberai pas dans le panneau de l’intoxication devenue la spécialité de la RTG. La Guinée va mal et c’est le moindre des euphémismes en parlant de ce pays.
A quoi ressemble donc la marche des Guinéens à qui de président en président, on n’a pas cessé de présenter un futur radieux, tout en faisant tout le contraire de ce qu’il faut pour y parvenir’
Il fut un temps en Guinée, celui de l’adolescence de nos générations, où les hyènes pullulaient dans de nombreuses contrées du pays. Il s’agissait de zones d’élevages de caprins, d’ovins et de bovins. La présence de ces prédateurs imprégnait si fortement la vie culturelle de nos villages que les séances régulières de contes, organisées, la nuit tombée, autour de la grand-mère ou de tout autre membre de la famille, avaient pour personnages principaux, l’hyène et le lièvre. L’hyène, toujours brutale, vantarde et sotte mais sûre d’elle-même comme on ne peut pas l’être raisonnablement, perdait à coup sûr dans toutes les aventures entreprises avec son rusé compère, le lièvre, d’où son caractère entêté à s’arc-bouter sur des positions qu’elle croyait avoir conquise pour toujours. Le portrait moral qu’on traçait de son personnage, mettait en lumière, un caractère obtus, dissimulateur, hypocrite, sournois et surtout une absence totale de scrupules et de vision de ce que sera demain.
Par-delà l’atmosphère feutrée de ces contes nocturnes, et dans le monde réel, les petits auditeurs, assidus étaient le plus souvent, terriblement saisis d’angoisse, par les ricanements tapageurs des hyènes sur les collines herbeuses des environs des parcs à bœufs. Des inquiétudes pouvaient même se lire parfois sur le visage grave de certaines grandes personnes. Ce qui accroissait le malaise et l’épouvante des plus petits. Le matin venu, les villageois constataient, avec consternation, les résultats des ricanements diaboliques qui avaient accompagné les festins sanglants des maîtres de la brousse : ici, c’était une bergerie mal fermée qui avait été saccagée, là, un peu à l’écart du village, un parc à bœufs dispersé et des carcasses béantes de vachettes ou de veaux.
Avec les années et l’organisation des villages d’élevage par empoisonnement et chasse des prédateurs, les ricanements triomphants des hyénidés d’autrefois se sont largement estompés ou ont même disparu de régions qui étaient leurs fiefs.
Malgré les campagnes des défenseurs de la biodiversité, le temps de l’arrogance des hyènes de la race animale et leurs lugubres ricanements nocturnes, pleins de sous-entendus dévastateurs, se sont faits de moins en moins entendre sur toute l’étendue du territoire guinéen. La peur des hommes s’est estompée et chacun s’était mis à espérer la levée d’une aube nouvelle avec ce qu’on a pompeusement baptisé la libération, l’indépendance de la Guinée colonisée.
Mais depuis la naissance de la République de Guinée, cela fait cinquante-quatre en 2012, une nouvelle race d’hyènes habillées en hommes a fait son apparition. Sous les prétextes fallacieux de libération, de dignité et de plein développement humain, des parvenus sans foi ni loi, se sont toujours emparés du pouvoir suprême de l’Etat pour la satisfaction de leur égo. Car quoi’… Qu’ont fait, en matière de dignité humaine, les présidents de la République, pour le peuple de Guinée, au cours des 54 années rappelées’ Si ce ne sont des mensonges, des élucubrations, des verbiages qui ont été toujours considérés comme des faits accomplis. Bref des montagnes d’imposture, à la barbe du pauvre peuple guinéen. Tout cela pour l’unique et simple objectif de se maintenir indéfiniment au pouvoir. Les ricanements de ces hyènes qui ont pris en otage le peuple de Guinée, cesseront quand l’heure de l’organisation de la résistance des Guinéens sonnera. Il s’agit de la vraie organisation qui se mettra au-dessus des bisbilles ethniques. Nul ne peut d’ailleurs affirmer que des batailles ethniques de grande ampleur, opposant telle ethnie à telle autre ethnie, se soient produites en Guinée. L’exacerbation de la question ethnique dans notre pays à partir des années 1954-1956 est une création de certains hommes politiques, limités sur tous les plans et leurs séides et successeurs. Y a-t-il exagération à voir la réalité guinéenne sous un angle aussi sombre’ Certains étrangers résidents ou de passage en Guinée, pourraient le croire. Mais l’apparente gaieté, je dirais même l’apparente joie de vivre des Guinéens, cache, souvent, une situation de profonde souffrance psychologique qu’on ne peut ressentir que du plus profond de son moi. Cette sensation intérieure n’est pas accessible à tout le monde et encore moins à des étrangers qui s’en tiennent à des comportements superficiels. Même en situation de colère et de souffrance, le Guinéen n’expose pas facilement ses états d’âme. Les dirigeants, enivrés de pouvoir ont, de tout temps, abusé de cet état des choses. C’est pourquoi, l’Extérieur doit examiner avec précaution les dits et faits théâtraux, et manœuvres dilatoires de l’actuel président de la Guinée.
Est-il besoin de rappeler la litanie des méfaits de la mauvaise gouvernance sur le peuple de Guinée’ Je crois que c’est inutile, chacun les connaît. Mais en ne revenant pas, ici, à la période de la Première République (1958-1984) qui a engendré ce que d’aucuns appellent la malédiction qui pèse sur la Guinée, on peut rappeler, en un survol rapide, le constant écrasement des Guinéens par leurs dirigeants. Ceux-ci, de la dictature militaire à aujourd’hui, n’ont jamais vraiment admis une quelconque opposition à leur pouvoir. C’est la tentation totalitaire, sous des vocables différents, qui les a animés, y compris le président civil, Alpha Condé, élu en novembre 2010.
SOUS L’ERE DE LA DICTATURE MILTAIRE
=== > Les tragiques répressions d’une ethnie, celle des Malinkés, à la suite de ce qu’on a appelé la tentative de coup d’Etat du colonel Diarra Traoré, n’ont pas soulevé une solidarité d’autres ethnies. A cette passivité, certains expliquent, à juste titre, que la forte répression d’une autre ethnie, celle des Peuls, en 1976-1977, n’avait soulevé aucune compassion chez d’autres.
===> Sur la barbare répression des jeunes à Conakry en 2006-2007 qui a causé des pertes de nombreuses de vies humaines, des villes de l’intérieur du pays n’avaient pas beaucoup ou peu bougé.
===> Le 28 septembre 2009 au stade du même nom, des manifestants aux mains nues sont abattus par l’armée comme des lapins (156 victimes et des blessés). Mais comme ceux-ci étaient supposés appartenir massivement à l’ethnie peule, vouée aux gémonies par des sbires du système en place, l’élan de solidarité n’a pas été à la hauteur de ce qu’on aurait pu être en droit, d’attendre.
On voit donc que les ethnies guinéennes qui avaient toujours vécu en bonne intelligence, doivent comprendre par l’entremise de leurs éléments éclairés que c’est la solidarité interethnique qui les sauvera du carcan dans lequel on les a enfermées.
En n’ayant retenu que les faits saillants que je viens de citer, il faut ajouter que de nombreuses atteintes répétées à la dignité et à la vie humaine ont jalonné le parcours quotidien du combattant à l’existence du Guinéen.
Toutes ces ignominies ont bénéficié d’une situation que tout le monde connaît: L’impunité. Les auteurs des faits incriminés n’ont jamais été inquiétés, s’ils n’ont pas bénéficié de promotions étatiques. Ainsi allait la Guinée ns dacette ère de tontons macoutes.
SOUS L’ERE DE LA DEMOCRATIE ANNONCEE
Après l’élection d’Alpha Condé, nombreux étaient ceux qui avaient estimé que du fait de sa longue opposition politique et de ce qu’il promettait, il pouvait légitimement soulever l’enthousiasme d’une large couche de nos compatriotes. Il faut d’ailleurs préciser que tous ses prédécesseurs avaient, à leur manière aussi, fait l’objet d’engouement pas toujours rationnel. Mais dans le cas d’Alpha Condé, son statut du premier intellectuel du pays à accéder à la magistrature suprême, en novembre 2010, avait joué fortement en sa faveur, tout autant que sa non-participation à des gouvernements sous Lansana Conté dont le haut personnel avait longtemps été traîné dans la boue par lui pour avoir pillé l’économie et les finances de la Guinée. Le premier couac de sa gouvernance est venu lorsqu’on l’a vu s’entourer des mêmes personnages vilipendés et honnis dans ses discours de campagne. Il n’y avait pas de mots assez durs pour stigmatiser « tous ces voleurs qui ont mis la Guinée à genoux ».Ce n’est pas seulement sur le reniement de ce point d’orgue de sa campagne présidentielle que portent les critiques.
Je dois préciser que je ne me serais pas mêlé à des concerts d’observations critiques s’il devait s’agir de s’attendre à des miracles de réalisations, en Guinée, en tous domaines en vingt mois de gouvernance (août 2012). L’objet de mes observations critiques se situe ailleurs.
Une réalité d’amateurisme dans la politique générale menée pendant ces vingt mois par Alpha Condé, s’illustre dans un secteur aussi important que les mines, dans l’économie guinéenne. Le président guinéen disait il y a peu à qui voulait l’entendre qu’il y avait effectué de grandes réformes, notamment sur les contrats miniers. Mais après la découverte récente de diverses magouilles dans des contrats signés en catimini, il s’est défaussé de son incompétence en la matière en incriminant des cadres qui l’auraient « poussé à signer ». En guise d’excuse à cette flagrante défaillance, il promettait de faire désormais appel à des grandes banques d’affaires et à des grands avocats. Et dire qu’il a affirmé vouloir « surveiller et vérifier tout » en Guinée!
Pour un juriste de formation qui promettait de rétablir l’Etat de droit, à part les apparences et les déclarations fracassantes à l’attention de l’étranger, c’est l’arbitraire qui fait encore office de lois dans le pays et le président n’est pas le dernier à fouler aux pieds les textes de lois en vigueur et la constitution. Dans un tel contexte, quand on entend parler de commissions indépendantes d’enquête pour divers graves faits de société ou de crimes, bien des Guinéens raisonnables se disent que cela correspond à ce qu’on appelle dans d’autres pays « affaires classées ».
Et on continue de parler de démocratie (mais de quelle démocratie’), le président a la haute main sur tous les rouages de l’Etat, et sur toutes les institutions républicaines : « … les mauvaises habitudes prises sont telles que je dois tout surveiller et tout vérifier. », répond-il dans une interview de l’hebdomadaire Jeune Afrique n°2628 du 22-28 mai 2011. Mais il y a plus qu’une motivation de recherche d’efficacité dans tous les rouages de l’Etat. Comment, du reste, un homme qui n’a exercé concrètement aucune activité professionnelle connue jusqu’à ses 73 ans révolus, peut-il être devenu expert ès arts dans toutes les activités menées au cœur dirigeant d’une nation’ Il faut être de la catégorie d’un Staline ou d’un Sékou Touré qui se proclamaient urbi et orbi omniscients en tout. Autrement dit, une tentation dictatoriale est en cours dans notre pays. C’est ce qui se profile dans la conscience et le comportement à peine voilé d’Alpha Condé. L’opposition qu’on tente de museler, sent les choses ainsi. C’est le lieu alors des fades courtisans du pouvoir de la taxer d’opposition radicale.
Depuis son élection qui semble avoir créé en lui un mal-être se traduisant par une bougeotte aux quatre coins du monde, alors qu’il n’a jamais visité l’intérieur de son pays, il s’acharne, par médias publics interposés (la voix de son maître) et par une batterie de mesquineries sur les leaders crédibles de cette opposition politique que sont Cellou Dalein Diallo (UFDG), Sidya Touré (UFR), Lansana Kouyaté (PEDN). Ces trois leaders viennent de faire l’objet, semble-t-il, d’une tentative d’attaques graves, selon des déclarations de Sydia Touré. Si ces déclarations s’avéraient vraies (mais comment vérifier, tous les instruments d’Etat étant dans les mêmes mains’), c’est que nous sommes déjà en Guinée, à une étape du totalitarisme qui n’a pas encore dit son nom.
Depuis ce qui pouvait être qualifié d’ère de la démocratie, des situations contraires à la démocratie perdurent avec, pourrait-on dire, la passivité de « l’opinion publique nationale » formatée par les organes d’informations publics sous conditions. Plus que des situations de simples dysfonctionnements de ce pays qui n’était plus un Etat, comme l’a dit Alpha Condé, c’est une véritable situation d’embrouillamini qui se constate. Mais l’Etat dont il se targue d’avoir entrepris les réformes est encore largement dans les limbes. Les mêmes imbroglios sur fond d’une dictature rampante et de misère du peuple, perdurent alors qu’à usage de l’Extérieur, la propagande du pouvoir fait croire qu’il a déjà accompli des exploits.
Mais quels exploits’
L’esprit des réformes entreprises aurait dû commencer à s’implanter dès le début de la campagne présidentielle de 2010, par un deal solennel entre candidats pour agir dans le strict cadre d’une éthique publique qui, de tout temps, a fait défaut aux dirigeants successifs du pays: l’approche nationale et non ethnique de la conquête démocratique du pouvoir. Hors de cette démarche, tout candidat se disqualifie. Or on a assisté, lors du second tour de l’élection présidentielle, à des actions racistes contre des citoyens guinéens d’ethnie peule, notamment à Siguiri et ailleurs, sans que des leaders de ces zones, encore moins la population, sous contrainte, aient réagi. Après l’élection, le pouvoir s’est contenté de petits débauchages subalternes en lieu et place d’actions de réconciliation, seul concept de base qui vaille pour que les Guinéens se retrouvent.
Il a été proclamé que l’armée est retournée dans les casernes et qu’on ne voit plus de soldats armés dans les rues de Conakry. Cela peut se confirmer, peut-être, par des représentations diplomatiques dans cette ville. Mais à la moindre alerte (manifestations notamment) dans la capitale et à l’intérieur du pays, ce sont l’armée, la gendarmerie et la police, aux réflexes de tontons macoutes haïtiens du temps des Duvalier, père et fils (1957-1986), qui sont requises par les préfets et gouverneurs pour mater des manifestants aux mains nues. L’exemple type de cette utilisation de l’armée, de la gendarmerie et de la police contre la population a eu lieu au début du mois d’août 2012 à Zoghota en Guinée Forestière. Des villageois cultivateurs de cette zone (neuf villages de Guinée-Forestière) manifestent contre la société VBG qui exploite des minerais de fer dans cette zone, pour une indemnisation des terrains dont ils ont été dépossédés et pour que les jeunes du terroir puissent bénéficier d’embauches comme d’autres de leur niveau, venus d’ailleurs. Quoi de plus normal’ Ce mouvement de protestation s’accompagne de destructions de matériels de la société. La réponse des pouvoirs publics par ses missi dominici que sont le gouverneur de région et le préfet de N’Zérékoré, fut d’envoyer nuitamment des militaires et des gendarmes fortement armés, qui massacrèrent sur place au moins 6 villageois et en blessèrent d’autres. Face à cet ignoble crime contre l’humanité (du même type de crime que le 28 septembre 2009 à Conakry ), le président Alpha Condé, au lieu de se rendre sur place, n’a pas trouvé mieux que d’y envoyer des émissaires chargés de présenter ses condoléances aux parents endeuillés et de leur remettre une modique somme d’argent puis de limoger les lampistes que sont ses missi dominici. C’est le même scénario qui se passe partout, à Siguiri comme ailleurs, où ce sont les préfets qui font les frais de leur zèle vis-à-vis du pouvoir central. Mais la sinistre affaire de Zoghota, peut avoir des conséquences sinistres pour le pouvoir d’Alpha Condé. Il faut qu’il sache que les peuples de la Guinée- Forestière dans leur ensemble, ont toujours été très paisibles jusqu’au jour où tombe la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Les Forestiers pour qui on a souvent fait montre d’altière condescendance, furent les derniers résistants à la colonisation française en Guinée. Le peuple kpélé (guerzé), auxquels appartiennent les « Zoghotais », fut l’un des derniers soumis par cette colonisation en 1911 alors que la Guinée française faisait déjà partie de l’Afrique occidentale française (A.O.F.) constituée depuis l’année 1895. Ce type de résistance a été constaté chez les Kono, Manon, Toma (Loma), Kissi, etc. Par conséquent le genre traditionnel de mépris et de condescendance vis-à-vis du Forestier, comme le fait d’acheter le silence des parents de tués à Zoghota, risque de se retourner tôt ou tard contre les ricanements des hyènes accrochées au pouvoir en Guinée. Ces ricanements sont aussi ce qui est adressé presque quotidiennement aux grands dirigeants de l’opposition: Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré, Lansana Kouyaté, Aboubacar Sylla, Jean Marie Doré, qui sont tous plus menacés que s’ils vivaient sous le régime de Lansana Conté. Le petit peuple qui vit dans la misère, subit quotidiennement les effets ravageurs des ricanements des hyènes en place, couverts à sens unique par les médias publics qui bluffent journellement l’opinion sur les réalités guinéennes. Voilà des aspects pas toujours connus de l’extérieur sur le pouvoir en place à Conakry.
Et celui qui mène cette barque ne semble pas se douter qu’il risque d’aller à l’échouage s’il s’entête à poursuivre la voie qu’il s’est tracée. Alors qu’il contrôle toutes les institutions républicaines, il ne veut pas franchement s’engager sur les chantiers suivants:
L’interminable finalisation de la transition que ne cessent de réclamer le Collectif des partis politiques (opposition) pour cette finalisation et l’Alliance démocratique pour le progrès (ADP).
Les marches de manifestations de l’opposition sont toujours entravées comme dans des régimes de dictature, des manifestants du 27 août dernier ont été arrêtés. De quoi a-t-il donc peur, le régime en place’ Que cette opposition ne montre à l’opinion sa force, au-delà de tout ce qui se dit contre elle à la RTG’
La fameuse recomposition de la CENI (Commission nationale électorale indépendante) qui soulève toujours des houles et l’inflexible question du fichier électoral: deux goulets d’étranglement des élections législatives.
Les législatives! Quand auront-elles lieu en fin de compte’ A force de se faire attendre, elles risquent de décevoir, même si elles se passent bien, tant les espoirs mis en elles sont grands.
Différentes affaires continuent de ternir l’image du pays (tueries, Friguia, révocations d’autorités administratives zélées qui ne sont que de simples lampistes d’une administration confuse).
Nombreuses demandes d’ouverture d’enquêtes qui ne seront suivies d’aucun résultat tangible. « Affaires classées », disent des sceptiques.
Par-dessus ce panier de crabes, l’Etat tient la population en haleine sur ce qu’est l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative pays pauvres très endettés (PPTE) du FMI et de la Banque Mondiale. Cette initiative qui date de 1996 a été réformée en 1999 (PPTE renforcée). Il s’agit d’obtenir la réduction de la dette d’un pays en fonction de ses efforts dans la lutte contre la pauvreté. De nombreux pays, notamment africains, se sont précipités pour figurer sur cette liste de la mendicité planétaire. La Guinée n’y est pas encore parvenue, tout en montrant toutes ses bonnes volontés et les passages à Conakry de fonctionnaires du FMI, constituent un événement qui retient l’attention des autorités et des médiats. Qui eût cru dans les années 60 que la fierté de la riche Guinée, chantée alors comme « un scandale géologique », serait soumise au début de ce XXIe siècle, à l’épreuve « humiliante » d’être du nombre des pays mendiants de la planète’
Tout cela pour dire aux dirigeant politiques guinéens et principalement au président de la République qui détient la totalité du pouvoir du pays que ce ne sera jamais à son seul niveau que les changements (formation des Guinéens, aménagement de l’espace national, toutes les variables qui contribuent à l’évolution de la société, etc.), interviendront. Celui qui, cependant, détient, aujourd’hui, la clef pour déverrouiller la société bloquée qu’est devenue la Guinée, c’est principalement le président Alpha Condé. Il faut qu’il accepte un dialogue franc, dénué de toute arrière-pensée politicienne, avec l’opposition guinéenne. Celle-ci doit pouvoir poursuivre, sans entraves, son organisation dans la perspective d’une participation inclusive à la construction nationale.
Si telle n’est pas la perspective d’évolution qui se dessine dans les temps qui courent, l’Histoire retiendra sans doute que ce fut sous les régimes des présidents de 1958 à l’année X que la République de Guinée a connu une douloureuse descente aux enfers.
Mais quelle que soit la longueur des cycles historiques qu’enregistrent les nations, il arrive une phase de retournement de ces cycles. A des phases de profondes dépressions succèdent des phases de reprise et de renouveau de la démocratie. Alors, de vieilles grands-mères guinéennes raconteront à leurs petits-enfants, sous forme de fables, la longue tragédie passée du pays et elles termineront, parlant des drogués de pouvoir politique du temps révolu: «… c’était quand les hyènes ricanaient en semant la peur et la stérilité sur ce pays. »
GUINEEACTU/Ansoumane Doré