Les Guinéens n’ont aucune raison de choisir quand on sait que » choisir » pour beaucoup d’entre eux , c’est se trahir. Surtout que le pays a toujours vécu dans l’ambiguïté des convictions et des reniements personnels fréquents.
Le pire, ceux qui traversent le temps et les régimes en gardant le même aplomb et renouvellent leur fidélité à tous les présidents, quels qu’ils soient , sont mieux » protégés » et toujours plus heureux que ceux qui ont l’imprudence de tout sacrifier à leur liberté de choix et de conscience.
Alors pourquoi courir le risque inconsidéré de choisir, quand on sait que demain appartient à qui est avec le pouvoir’
En cette année électorale 2015, celle d’une élection présidentielle loin d’être banale qui ne désignera pas seulement un Président , mais scellera le sort du pays et l’avenir de Chacun, le pays est encore face à la difficulté du Guinéen à voir plus loin que l’immédiat et à se projeter dans un changement, jugé toujours improbable devant le pouvoir qui a toujours raison de tout et de tout le monde. Autres temps, les mêmes mœurs et très souvent les mêmes acteurs.
Aussi , bien que l’aspiration au changement soit partagée par les adversaires et partisans d’Alpha Condé qui, dans leur penchant patriotique, redoutent un autre mandat de lui, il se trouve encore des Guinéens portés à afficher un soutien intéressé et débile à son régime finissant.
Pour eux, comme d’habitude, si le Chef de l’Etat est reconduit dans ses fonctions, ils auront tout gagné , s’il est battu, ils n’auront rien perdu.
Un pari pascalien qui n’a jamais été démenti à ce jour comme on le voit avec Alpha Condé lui-même qui gouverne aujourd’hui avec les ennemis d’hier. Ainsi va la vie publique guinéenne : les amis d’hier sont les ennemis d’aujourd’hui, les ennemis d’aujourd’hui seront les amis de demain.
C’est pourquoi , le changement est chaque fois reporté à cause d’une rupture impossible au profit d’une continuité accommodante pour une société figée.
Ce ne serait guère surprenant que les soutiens et hérauts de l’actuel pouvoir soient les chantres de l’alternance annoncée et fatidique.
Déjà, nombreux sont ceux qui , tout en maintenant leur lien apparent avec Alpha Condé , courtise frénétiquement une opposition assurée , pour peu qu’elle se montre ferme et vigilante , d’arriver aux affaires.
En public, ils sont dans la majorité présidentielle, en privé, ils expriment leurs désaccords et prétendent militer pour l’avènement d’un nouveau régime.
Heureusement que ces » Chauve-souris » de la politique sont les mêmes-donc connus de tous-qui, depuis de nombreuses années, ne veulent pas céder leurs places à d’autres habitués qu’ils sont à l’euphorie du pouvoir et jaloux d’avantages acquis et extrêmement fragiles.
Sans doute croient-ils prisonniers de certitudes plates et victimes d’anachronisme que la Guinée n’a pas changé et que les générations montantes sont pareilles à celles qu’ils ont connues et manipulent.
Or, le temps est passé, la société guinéenne, très attentive aux bouleversements intervenus dans le monde , fera aussi sa révolution.
Celle-ci, contrairement aux autres années et c’est tant mieux , sera marquée par un droit d’inventaire qui sera le filtre d’une élite usée par la longue pratique du pouvoir et honnie de tous.
La Guinée de demain , hantée encore par la résistance à une véritable reconversion des mentalités et l’indignité citoyenne, lentement mais sûrement , est en marche dans un monde où elle prendra sa place et retrouvera son leadership perdus.
En attendant cette aube nouvelle et inévitable, chacun est face à une responsabilité personnelle qui pèsera sur le devenir commun : soutenir Alpha Condé pour un autre mandat et donc aller à l’encontre de l’espoir de millions de guinéens ou s’engager pour un changement susceptible de réhabiliter le pays et rétablir chacun dans sa fierté dans un bonheur partagé.
Chacun et pour une fois dans l’ambivalence politique qui continue à miner la démocratie et à faire douter du patriotisme des guinéens, est appelé à se déterminer clairement et à s’assumer pleinement. L’heure de vérité est proche.
Et l’histoire départagera un clan qui, par tous les moyens, veut conserver un pouvoir mal acquis et punitif et un peuple, debout, pour retrouver son honneur bafoué, reconquérir ses droits et libertés confisqués dans une dictature en devenir mais sans le moindre avenir. Le peuple plie mais ne rompt jamais et triomphe toujours de l’oppression et des tyrannies.
En Guinée, aujourd’hui, il n’y a ni gauche, ni droite, ni centre, ni pouvoir , ni opposition à ce stade de notre histoire et de l’évolution du pays : il y a ceux qui préfèrent Alpha Condé à leur pays, à leur avenir et celui de leur peuple en s’obstinant à le soutenir malgré ses limites et le danger qu’il constitue pour la Guinée et les autres majoritaires frustrés que leur pays sombre chaque jour d’avantage et mobilisés fortement pour le changement salvateur.
Par la grâce infinie de Dieu et le sursaut puissant d’un peuple humilié et défié dans sa quête de progrès et de démocratie, les patriotes et démocrates guinéens mettront fin , cette année , au règne décadent et mortifère du fugitif de Piné et fossoyeur inégalable de la Guinée.
Même dans la vieille et très conservatrice Europe où il est rare que de nouvelles figures s’imposent , malgré l’émergence remarquable d’une autre génération d’hommes politiques de plain-pied dans leur époque, la classe dirigeante change chaque jour.
Exemples: Italie, Grèce….Pendant ces révolutions des âges et de montée en puissance de générations nouvelles plus qualifiées et proches des défis de leurs temps, la Guinée , au risque d’être encore la risée du monde, ne peut choisir Alpha Condé : un homme du passé, dont le lourd passif est une épreuve et un défi pour l’avenir et condamne à jamais quiconque ose encore se réclamer de lui et souhaiter qu’il rempile.
Ce n’est pas que manquer de patriotisme seulement , c’est aussi faire » l’apologie du crime » que de défendre un homme qui a détruit tout un pays et ruiné tout un peuple. Le peuple reconnaîtra les siens à l’heure du choix.
Par Tibou Kamara