Centrafrique: pillages et tirs nocturnes à Bangui après la démission du président

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Le président centrafricain Michel Djotodia, accusé par la communauté internationale de passivité face aux violences interreligieuses dans son pays, a démissionné vendredi à N’Djamena sous la pression des dirigeants d’Afrique centrale qui l’y avaient convoqué pour un sommet extraordinaire.

Son Premier ministre, Nicolas Tiangaye, avec qui M. Djotodia entretenait des relations notoirement mauvaises contribuant à paralyser toute action publique face aux tueries à grande échelle, a également démissionné. Les deux hommes se trouvaient toujours à N’Djamena vendredi.

Une fois la nouvelle parvenue à Bangui, des milliers d’habitants en liesse sont descendus dans les rues pour laisser éclater leur joie. Sur les avenues de France, des Martyrs, de l’Indépendance ou encore au carrefour des Nations unies, ils chantaient ou hurlaient en courant “c’est fini, c’est fini !”.

La situation dans la capitale était vendredi soir “tendue mais sous contrôle”, selon une source militaire française qui a fait état de tirs sporadiques et de tentatives de pillage. “Il y a eu un regain de tension cet après-midi. Nous nous sommes réarticulés auprès des sites sensibles et notre but est de contenir tout embrasement de la situation sécuritaire. Nous sommes en état d’alerte et d’attention maximale”, a déclaré cette source.
Des blindés français de l’opération Sangaris avaient pris position près du palais présidentiel à Bangui, ont constaté des journalistes de l’AFP. Le camp De Roux, où est cantonnée la garde de M. Djotodia depuis le début de l’opération Sangaris le 5 décembre, se trouve non loin du palais présidentiel et de nombreuses armes lourdes y sont entreposées.
La France, ancienne puissance coloniale et qui a milité pour une intervention internationale afin de faire cesser les violences, a demandé un remplacement “dans les plus brefs délais” de Michel Djotodia.

“Aller aux élections”

“Il faut que le Conseil national de transition (CNT, parlement provisoire) établisse l’alternative provisoire parce que le but c’est d’aller avant la fin de l’année à des élections”, a déclaré le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
La Constitution provisoire centrafricaine stipule que le président du CNT assure un intérim, de 15 jours maximum, le temps d’organiser l’élection d’un nouveau président par le Conseil.
Le nouveau président de transition exercera ses fonctions jusqu’aux élections générales dont la date n’est pas encore arrêtée. Aux termes d’un accord antérieur, ce scrutin devait avoir lieu dans un délai de 18 mois à compter de l’investiture du président Djotodia en août dernier.

Les dirigeants de la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC), réunis au sommet depuis jeudi à l’initiative du chef de l’Etat tchadien Idriss Déby Itno, “ont pris acte de la démission” du président et du Premier ministre centrafricains, selon le communiqué final lu en séance plénière.

Vendredi peu avant 04H00, après des tractations marathon, les dirigeants d’Afrique centrale avaient demandé au CNT de préparer un accord aboutissant à une mise à l’écart de MM. Djotodia et Tiangaye, selon des sources proches des négociations, malgré le refus de proches de M. Djotodia.

Le vote du CNT était indispensable à un changement de la Constitution provisoire de Centrafrique pour décider du départ de M. Djotodia et du Premier ministre.

“La transition n’a pas fonctionné”

Les dirigeants de la CEEAC avaient envoyé jeudi en fin de journée un avion à Bangui pour amener dans la capitale tchadienne les 135 membres du CNT. En ouvrant le sommet, M. Déby avait dressé un réquisitoire contre la direction centrafricaine: “un seul constat doit être fait et il est amer: la RCA (République centrafricaine) subit au plus profond d’elle-même les agissements de ses propres fils, plongeant leur pays dans une guerre qui compromet dangereusement son avenir”.

Le président tchadien a rejeté la responsabilité de la crise sur les politiques centrafricains. “S’il y a eu échec, c’est celui de la classe politique dans son ensemble”, a-t-il lancé jeudi soir aux membres du CNT, concluant: “la transition n’a pas fonctionné”.

Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a réclamé vendredi de l’Union africaine qu’elle fasse monter plus vite en puissance la Misca, la force d’interposition panafricaine en Centrafrique qui doit compter 6.000 hommes à terme et n’en réunit que 3.500 pour l’instant.

Le secrétaire d’Etat John Kerry s’entretiendra de la République centrafricaine avec son homologue français Laurent Fabius à l’occasion de sa visite à Paris dimanche et lundi, a annoncé vendredi un diplomate américain.

Par ailleurs, l’Union européenne a donné vendredi son accord de principe au lancement d’une mission militaire européenne pour soutenir les interventions française et africaine.

L’organisation internationale pour les migrations (OIM) a décidé d’organiser un pont aérien pour évacuer de Centrafrique des milliers de civils venus de plusieurs pays africains voisins. Les premiers vols à partir de samedi vont permettre de transporter 800 Tchadiens de Bangui vers N’Djamena, a indiqué l’OIM dans un communiqué. Au total, 60.000 immigrés venus de pays voisins de la RCA ont demandé de l’aide à leurs ambassades respectives, selon l’OIM.

Depuis le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka, dirigée par M. Djotodia, la Centrafrique a été emportée dans une spirale de violences communautaires et interreligieuses sous le regard impuissant des institutions de transition.

AFP




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