“Guinéennes, Guinéens,
C’est avec beaucoup d’émotion que je m’adresse à vous ce soir, veille de la fête de notre indépendance nationale. C’est la neuvième fois consécutive que je me soumets à ce rituel, ô combien exaltant; moment exceptionnel qui me permet à chaque fois d’être en communion avec vous pour magnifier la grandeur de notre peuple et le passé glorieux de notre pays.
J’en tire à chaque fois un immense plaisir et rends grâce à Dieu qui, dans sa mensuétude et sa grandeur infinie, a permis cet accomplissement. Parmi vous qui êtes ce soir devant la télé à Kaloum ou accrochés à votre transistor quelque part à Lola, y en a pour qui je suis un grand-père. C’est pour moi une consécration de présider aux destinées de notre nation à 80 ans révolus.
Mes chers compatriotes,
Notre pays a 61 ans. Dans le registre de célébration d’anniversaires de mariages, ce serait des noces de platane, du nom de cet arbre majestueux à la longévité légendaire.
61 ans c’est aussi l’âge de la sagesse dans la tradition africaine. Mais qu’est ce que la Guinée ? C’est vous, c’est moi, c’est notre peuple et le territoire sur lequel nous vivons. C’est la Guinée du passé et du futur, certes, mais c’est surtout la Guinée contemporaine. C’est à nous d’incarner cette sagesse et de la transmettre.
En jetant un regard sur le rétroviseur de ces neuf dernières années, on s’aperçoit que notre pays avance. Pas à la vitesse voulue par tous, je le sais, mais il avance tout de même et sur le bon chemin.
J’entends les récriminations pour le déficit d’accès aux services sociaux de base tels que l’eau potable, l’électricité, le transport, l’emploi, les infrastructures, les soins de santé. J’entends les cris de désespoir de la jeunesse, je sais les difficultés qu’éprouvent la mère de famille, veuve, de Télimélé pour nourrir, soigner ses enfants et dormir dans un gîte décent, je sens la douleur du petit marchand de Kerouané à rallier les marchés hebdomadaires, sur des pistes pierreuses, pour vendre son igname.
Sachez que je me couche au palais mais je dors chez chacun d’entre vous !
Guinéennes, Guinéens,
Au cours des neuf ans passés, nous avons ouvert de nombreux chantiers. Certains sont à terme d’autres sont encore en cours. Je ferai en sorte que les réformes engagées contribuent au développement de notre pays et à asseoir une nation démocratique où les libertés publiques s’exercent sans crainte ni ressentiment. Avec vous, je veux bâtir une Guinée dont on se sent fier partout sur terre.
L’un des chantiers prioritaire de la prochaine année est la justice. Je m’engage ici et maintenant à organiser dans les trois prochains mois le procès du massacre du 28 septembre 2009. J’en ai instruit le ministre de la Justice. Il n’est plus question d’attendre l’aide, ni l’injonction de qui que ce soit pour organiser ce procès juste et équitable pour panser nos plaies et amorcer la réconciliation nationale. Il faut qu’on dépasse cette étape.
Plus personne ne se sentira lésé dans ce pays tant que je suis au pouvoir. Des enquêtes seront rapidement ouvertes sur toutes les violations de droit de l’homme, supposées ou réelles, de ces 10 dernières années. Je le dis haut et fort: nul n’est assez fort, assez puissant, fût-il le chef de l’Etat que je suis, pour échapper au glaive de la justice s’il est coupable de délit ou de crime.
Mes chers compatriotes,
J’ai entamé cette allocution en vous faisant part de mon émotion. Si Dieu me garde encore en vie, je serai à votre place, devant ma télé, pour suivre l’adresse à la nation du président de la République pour la fête d’indépendance de 2021 ! C’est mon avant-dernier exercice.
Conformément à la Constitution sur laquelle j’ai prêté serment à deux reprises, je quitterai mes fonctions de président en fin 2020. L’agitation autour de la constitution s’arrête dès aujourd’hui. Tout le monde se met au travail pour organiser les législatives avant le début de la prochaine legislature en avril prochain.
À partir de maintenant, toute personne qui se livrera à la promotion d’une nouvelle constitution fera face à la rigueur de la justice.
Je termine en rendant un vibrant hommage à nos héros de l’indépendance qui nous ont offert la liberté de parler la tête haute.
Je souhaite à chacun et à tous, bonne fête. Je vous remercie.”
Mais HÉLAS ! 😅
Texte publié par Alimou Sow sur sa page facebook