Pour Alpha Condé, le développement des infrastructures passe par l’empire du Milieu. Usant de son statut de président de l’Union africaine et d’une invitation à participer à ce titre au sommet des Brics (Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du Sud) qui avait lieu du 3 au 5 septembre à Xiamen, dans le sud-est de la Chine, le chef de l’État guinéen en a profité pour approfondir ses liens avec Xi Jinping, dont il avait attentivement lu la biographie ainsi que le recueil de discours et de textes La Gouvernance de la Chine, lequel l’a reçu longuement. Mais aussi pour missionner son ministre du Partenariat public-privé, Ibrahima Kassory Fofana, chargé de négocier, en marge des rencontres des chefs d’État, un accord de prêt pour la Guinée de 20 milliards de dollars (17 milliards d’euros) auprès des banques chinoises, soutenues par la China Exim Bank, la banque publique d’import-export.
De la déclinaison de ce prêt on sait peu de chose, en dehors des déclarations liminaires de Fofana et de celles du Premier ministre, Mamady Youla. Selon ce dernier, parmi les projets concernés figureront la construction d’une université, la rénovation de la route nationale numéro 1 (qui parcourt le pays d’ouest en est) ainsi que des infrastructures de Conakry. Une source proche des autorités indique que des projets miniers – autrement plus profitables – sont inclus dans la liste des projets financés par les banques chinoises, mais uniquement dans la filière bauxite-aluminium et pas (encore) dans le fer.
Le mégaprojet de fer du mont Simandou, repris par le chinois Chinalco et dont les infrastructures peinent à être financées, ne serait donc pas concerné. Selon Ibrahima Kassory Fofana, le prêt de 20 milliards sera divisé en une série d’engagements financiers, un pour chaque projet, les banques chinoises étudiant chacun d’entre eux et ne donnant une réponse positive que si un modèle économique se dégage, permettant de rembourser capital et intérêts. Dans ces conditions, se pose la question de savoir si les banques chinoises financeront bien des infrastructures routières ou éducatives, nécessairement déficitaires, s’il n’existe pas de péréquation entre les projets rentables – notamment miniers – et ceux qui ne le sont pas.
Nouveau prêt de la part de la Chine
À Conakry, ce nouvel accord annoncé le 5 septembre avec ce montant faramineux – trois fois le PIB du pays – a ravivé le souvenir d’un autre pacte avec la Chine, lui aussi qualifié d’« historique » à l’époque et négocié en 2009 par la junte militaire et le controversé ministre des Mines de l’époque, Mahmoud Thiam, mis en cause dans des affaires de corruption autour du mont Simandou. Conakry avait annoncé 7 milliards de dollars d’investissement à travers le China Investment Fund (CIF), notamment dans les infrastructures.
Dans les faits, une infime partie seulement de cette somme aurait été décaissée, tandis que des contreparties minières seraient restées complètement opaques. Le gouvernement actuel affirme que le prêt négocié n’a cette fois rien à voir avec le troc « infrastructures contre matières premières » de 2009, et que la transparence et la viabilité économique de ce nouveau mégaprêt chinois seront assurées.
Par jeuneafrique.com