La Guinée traverse des moments difficiles de son histoire. En 2010, les guinéens élisent un président civil, « démocratiquement ». L’espoir est permis pour une bonne partie des guinéens. Ce qui est logique, parce que ce fait mettait fin aux régimes militaires corrompus.
Le président Alpha Condé élu, est l’heureuse personnalité chargée de diriger les nombreuses reformes politique, social, et économique. Il faut le signaler, que même si son élection ne fut pas totalement propre, pas mal de guinéens qui n’avaient pas voté pour lui, comptaient voir des changements positifs.
Des changements qui ne se présentent pas. Alpha Condé au pouvoir depuis presque trois ans, le désespoir est installé. Les changements attendus, les minimums, ne sont pas réalisés : le tissu social s’est fragilisé, le désordre s’est installé dans les réformes institutionnelles, etc.
Souvent, quand il y a un tel événement fâcheux dans une société politique, le bon sens cherche des explications rationnelles. Des causes rationnelles qui ont permis que tel ou tel fait se soit tourné en rond.
Dans cette perspective causale, le président Alpha Condé et son gouvernement seront attaqués dans plusieurs fronts. On citera l’inexpérience du président, son point faible d’avoir gagné les présidentielles en manipulant des communautés ethniques. Son incapacité politique à se faire entourer par des personnes qualifiées, voire apolitiques, etc.
Mais, un autre détail non moins important défavorise Alpha Condé et explique clairement le blocage actuel des reformes en projet : son orgueil.
Vous avez sans doute remarqué le président dire, toujours : « C’est moi qui fait tout. Je suis obligé d’être partout. Et voilà pourquoi j’ai mes cinq téléphones portables pour pouvoir diriger par-ci, et par-là.
A propos de sa capacité académique, il ne cesse de répéter : « Ah ! Tel ministre français ! Je le connais, nous avons fait des études ensemble ». Ou autre supercherie : « Je donne des conseils politiques à certains présidents africains ».
Aussi, à propos de ses diplômes universitaires, tout est flou : il a raconté à beaucoup de gens (il doit certainement le regretter aujourd’hui) qu’il possède plusieurs diplômes dans les sciences. Qu’il est sorbonnard (enseignant à la Sorbonne).
Et quand il était dans l’opposition, il disait aussi, et toujours : « Moi ! Sur la même table que ces gens (s’adressant à Conté et à ses ministres) ! C’est impossible ! Nous ne sommes pas de la même catégorie ».
Ou très récemment, Alpha Condé disait : « J’ai trouvé la Guinée là où Sékou Touré l’a laissée ».
Et comme vous devez le remarquer, ces détails sont des caractéristiques typiques d’une personne orgueilleuse. L’orgueilleux est cet individu qui a un excès de confiance en soi : dans ce qu’il dit, dans ce qu’il fait, dans les décisions qu’il prenne. Pour lui, tout ce qu’il fait est parfait. C’est lui seul qui fait bien. Et personne ne peut le contredire.
Avoir confiance en soi est une bonne chose. Mais un excès de confiance en une idée ou une certaine situation déterminée, peut paralyser tout le positif qui peut nous arriver. L’excès de confiance ne nous donne pas la marge pour nous améliorer. L’orgueilleux dit : « Ce que j’ai fait est parfait ». Il ne dit pas : « Que puis-je faire pour m’améliorer ». Et comme il ne peut pas s’améliorer, sans se rendre compte, tout se bloque.
Comme nous sommes dans l’effort de situer exactement la personnalité chancelante de notre président, il serait nécessaire de ressortir tous les détails, en catégorisant l’excès de confiance en trois parties.
Il y a :
-Excès d’amour-propre : « Si je ne suis pas présent, cela ne va pas fonctionner. Si moi je m’en vais, le pays disparaît. Sans moi, ce projet échoue ».
-Excès de confiance en sa propre capacité : L’orgueilleux n’accepte pas des suggestions. Quand vous lui dites : « Regarde, ça tu pourrais le faire d’une autre manière », il te répondra : « Non, non, parce que ainsi, j’ai été sans faute ».
-Excès de confiance en sa propre manière de penser : « Peu importe, pour moi c’est ainsi et point final ».
Tous ces trois types d’excès de confiance accablent la personnalité du président Alpha Condé.
C’est un sérieux problème pour un homme politique. Il faut le répéter, la confiance en soi-même et aux autres est très bon et productif. Cependant, nous avons besoin de laisser une marge nécessaire pour améliorer, questionner, reconnaître les erreurs. Si tel n’est pas le cas, c’est la paralysie mentale, paralysie qui nous empêche de rêver.
Comme pour joindre la théorie à la pratique, très récemment, Alpha Condé s’est rendu au Nigeria dans le cadre d’une conférence de la CEDEAO. A un moment où au sud de la Guinée, les violences tribales font des morts et des morts.
Alpha Condé ayant beaucoup de confiance en sa propre manière de penser, n’a sans aucun doute, répétons-le, sans aucun doute, écouté les suggestions de ses nombreux conseillers, qui lui auraient empêché d’effectuer le voyage.
Il est parti au Nigeria pendant que des problèmes très sérieux secouent son pays. Des problèmes qui peuvent lui coûter même sa présidence. Il s’en va avec ces termes : « Peu importe, le calme est déjà revenu en Forêt ».
Et surtout ce qu’il pourrait raconter à ces homologues chefs d’Etat de la sous-région, qui seraient surpris de le voir faire le déplacement malgré le chaos dans son pays : « Oh ! Ne vous inquiétez pas ! Tout est sous contrôle ! Vous savez, dans mon pays, je suis au four et au moulin ».
N’est-ce pas que tous les guinéens, sans distinction aucune, doivent réfléchir bien et voter massivement le 24 septembre prochain, pour un changement rationnel et significatif ‘
Alpha Condé ne peut pas diriger une nation. Son orgueil est un frein à tout changement utile et démocratique. Car, l’orgueil est le complément de l’ignorance.
Naby Laye Camara
Bruxelles