A la Une: le 5e anniversaire du massacre du stade de Conakry

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C’était le 28 septembre 2009, au moins 157 opposants à la junte alors dirigée par le capitaine Moussa Dadis Camara avaient été tués par des soldats lors d’un rassemblement pacifique pour la démocratie. Plus d’une centaine de femmes avaient en outre été violées par ces mêmes soldats.

Cinq ans après donc, la justice n’a toujours pas été rendue. Mais il y a un frémissement, note Guinée Conakry Infos : une « volonté politique qui semble plus affirmée, relève-t-il. C’est ainsi que ces dernières semaines, la presse a évoqué une série d’auditions dont celle, pour la seconde fois, du capitaine Moussa Dadis Camara. […] Des obstacles qui, jusqu’ici, freinaient l’élan des trois juges en charge de l’instruction, seraient en train d’être levés. Les magistrats auraient ainsi finalement obtenu un bureau qui leur confère plus de sérénité. De même, ils ont été dotés en logistique. Enfin, ils ont, depuis quelque temps, droit à une certaine sécurité. Ne pas reconnaître dans cette évolution, la patte du nouveau ministre de la Justice, serait faire montre d’une mauvaise foi des plus évidentes. »

Toutefois, tempère Guinée Conakry Infos, « des insuffisances, il y en a encore. Parmi ces dernières : le fait que quelques-uns des 8 hauts gradés de l’armée guinéenne inculpés continuent à occuper des fonctions stratégiques au sein de l’appareil militaire du pays. Des positions dont ils peuvent se servir à tout moment pour remettre en cause ce qui est aujourd’hui perçu comme une dynamique positive. »

Pour sa part, le principal opposant guinéen, Cellou Dalein Diallo, lui-même blessé lors des violences du 28 septembre 2009, a interpellé le président Condé. Pour lui, rapporte le site Guinée News, « le devoir de l’Etat est de rendre justice contre les crimes du 28-Septembre. “Mais cinq ans sont passés. Cinq ans d’impunité, a-t-il déploré. Cinq longues et lancinantes années dans lesquelles s’étale l’intolérable incapacité de notre administration judiciaire. Alors que les victimes attendent, impuissantes, que cette douloureuse page de notre histoire soit enfin lue”. »

Pour ce qui est du capitaine Moussa Dadis Camara, le chef de la junte au moment des faits, il continue de couler des jours tranquilles en exil à Ouagadougou. Son avocat, rapporte le site Le Jour Guinée, « sans nier la responsabilité morale de son client, affirme que le gouvernement de l’époque n’était pas celui de la junte celui mais des Guinéens composés de civils et de militaires. […] “Mon client regrette ce qui est arrivé, poursuit-il. Il continue de demander pardon. Il tient à ce que justice soit rendue dans cette affaire. Mais, poursuit l’avocat de Dadis Camara, rien ne dit que la junte soit responsable. […] Et quand il voit comment va son pays aujourd’hui, j’avoue qu’il ne dort pas”, conclut-il. »

Dadis protégé ‘

Si le sommeil de Dadis est perturbé, ce n’est sans doute pas par les avancées de l’enquête, relève de son côté le site d’information Fasozine. « Car […] force est de constater que les inculpations ne sont pas encore à la hauteur des forfaits que l’on attribue notamment à des éléments des forces de défense et de sécurité. Une situation qui amène les organisations de défense des droits humains à soupçonner une sorte de protection accordée à ces suspects et à leur patron d’alors. »

Alors, s’interroge Fasozine, « faut-il craindre que devant la colère de plus en plus vive de ces organisations, le président Alpha Condé se décide à livrer son prédécesseur à la justice guinéenne ‘ Rien n’est moins sûr. Mais tôt ou tard, Dadis devra affronter ce sombre épisode de son passage à la tête de son pays pour espérer y retourner tranquille. »

Enfin, le quotidien Le Pays, toujours au Burkina, se demande si le président guinéen Alpha Condé ne protège pas directement son prédécesseur… Et cela pour deux raisons. Premièrement, le facteur ethnique : « Alpha Condé pourrait chercher à protéger son “parent” Dadis Camara. Cette hypothèse est d’autant plus plausible que la région d’origine de Dadis, la Guinée forestière, sous l’impulsion de ce dernier, avait massivement voté pour le fils de la Haute Guinée avec laquelle elle partage beaucoup d’affinités culturelles. »

Ensuite, poursuit Le Pays,« Moussa Dadis Camara est l’hôte du président Compaoré. Or, tout le monde sait qu’entre ce dernier et l’actuel président guinéen, il existe une vieille amitié voire une complicité. Les deux “amis” pourraient s’être entendus pour accorder une sorte d’impunité à “l’enfant terrible de la Guinée forestière” contre la garantie que celui-ci n’entreprendrait rien qui puisse déstabiliser le pouvoir du professeur. Cette hypothèse peut d’autant être défendue, relève encore le quotidien burkinabé, que le capitaine Dadis Camara bénéficie encore de sympathies au sein de l’armée guinéenne, dont rien n’indique qu’elle est subitement devenue républicaine avec l’avènement d’Alpha Condé au pouvoir. »

RFI




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