Le chef de l’armée égyptienne et ministre de la Défense, Abdelfatah el-Sisi, a annoncé dans la soirée du 3 juillet que la Constitution était suspendue, que la transition serait dirigée par le chef de la Cour constitutionnelle, Adly Mansour, et qu’une présidentielle anticipée serait organisée pour sortir le pays de la crise.
Mis à jour à 22h31.
Selon un de ses proches cité par l’AFP, le président égyptien issu des Frères musulmans, Mohamed Morsi, a appellé à résister pacifiquement au “coup d’État” mené selon lui par l’armée, qui a mis en oeuvre par la force, mercredi 3 juillet, son ultimatum adressé à la classe politique en suspendant la Constitution et en désignant le président de la Cour constitutionnelle, Adly Mansour, comme chef de la transition avant une présidentielle anticipée. Celui-ci, qui avait été nommé en mai à son poste, devrait prêter serment jeudi.
« Le président appelle tous les Égyptiens à résister pacifiquement à ce coup d’État, comme il le fera lui-même », a poursuivi la même source sous couvert de l’anonymat. « Ce qu’ils ont fait est illégal, ils n’ont pas autorité pour le faire », a ajouté ce collaborateur de M. Morsi, lequel est placé sous la surveillance de la garde républicaine.
« Les mesures annoncées par le commandement des forces armées représentent un coup d’État complet, rejeté catégoriquement par tous les hommes libres de notre pays », a déclaré de son côté Mohamed Morsi sur Twitter, tandis que, sur la place Tahrir, au Caire, des dizaines de milliers de manifestants exultaient de joie à l’annonce de sa chute.
Amendements constitutionnels
Lors de son allocution télévisée détaillant la feuille de route de la transition – sans en fixer de limites chronologiques précises -, le chef de l’armée, Abdelfatah el-Sisi, était entouré des principaux chefs religieux du pays et du représentant de l’opposition, Mohammed el-Baradei. « Un comité chargé d’examiner les propositions d’amendements constitutionnels sera formé », a ajouté le général Sisi. De même, un gouvernement regroupant « toutes les forces nationales » et « doté des pleins pouvoirs » sera chargé de « gérer la période actuelle ».
Le coup de force de l’armée prend place dans un contexte particulièrement tendu de protestations populaires contre le gouvernement de Mori et la politique menée après son accession au pouvoir, il y a tout juste un an. Depuis le 26 juin, des violences entre partisans des Frères musulmans et opposants ont fait 47 morts. L’armée avait finalement donné aux partis politiques un ultimatum de 48h, expirant ce mardi à 14h30, pour la résolution de la crise politique et avait sommé Mohamed Morside « satisfaire les revendications du peuple », dont une partie l’accusait de vouloir instaurer un régime autoritaire et islamiste.
Avant l’annonce de l’armée, des sources de sécurité ont affirmé que M. Morsi et plusieurs dirigeants des Frères musulmans avaient été interdits de quitter l’Égypte. Parmi eux, le Guide suprême de la puissante confrérie Mohammed Badie et son « numéro 2 » Khairat al-Chater.
Les blindés déployés au Caire
Après avoir rejeté l’ultimatum mardi et mis en avant la « légitimité » que lui confère son élection démocratique, Morsi a jusqu’au dernier moment tenté de régler la crise en proposant « un gouvernement de coalition et de consensus afin d’organiser des législatives à venir ». Alors que le ministère de l’Intérieur a affirmé qu’il répondrait « fermement » à toute violence, l’armée a renforcé la sécurité autour des établissements officiels et a demandé au personnel administratif de la télévision d’Etat de quitter les lieux. Des blindés ont été déployés au Caire, bloquant les voies menant aux rassemblements pro-Morsi.
« Je n’attendais qu’une chose, c’est que Morsi parte », affirmait Abdel Khalek Abdo, un agriculteur de 56 ans. « Il a répété au moins 1 000 fois le mot ‘légitimité’ comme si nous n’existions pas. Sa légitimité, il la tient du peuple qui aujourd’hui manifeste partout contre lui », a dit Rouaya, 19 ans, une manifestante voilée. Ailleurs au Caire, dans la soirée, des milliers de pro-Morsi étaient toujours massés sur la place Rabaa al-Adaouiya, dans le faubourg de Nasr City. « Morsi a été trahi, c’est un coup d’État contre un président élu », a lancé l’un d’eux.
AFP